François Rivière, Mort pour la France

Note : Cet article reprend une recherche effectuée il y a trente ans. Nous avons tenté d'actualiser les cotes des documents. La famille de François Rivière François Rivière est né dans la commune du Vigeant, dans le département de la Vienne. Sa naissance fut déclarée le lendemain de sa venue au monde, une date prédestinée : né le 13, il fut déclarée le 14 juillet 1885.

Il était le fils d'Adolphe Rivière et de Marie Couradeau. Ses parent s’étaient mariés le 8 octobre 1884 dans la commune de Queaux (Vienne), le petit François vint donc au monde… 9 mois et 5 jours après cette union. Adolphe était alors domestique, mais il devint rapidement cultivateur puis finalement cantonnier.

François était le premier enfant de cette famille mais fut bientôt rejoint par deux sœurs.
Joséphine née le 12 juin 1888 aussi au Vigeant
Marguerite née le 23 janvier 1891 à Lussac-les-Châteaux

La petite famille changea régulièrement de domicile passant du Vigeant, à Lussac-les-Châteaux, puis finalement Gouex où décéda la mère de François, Marie Couradeau, le 22 septembre 1893. Adolphe se remaria le 4 septembre 1897 avec Joséphine Villeger qui dans la commune de Gouex donna naissance à d’autres enfants :
Eugène, le 13 mai 1898
Marie Louise Adrienne, le 10 juillet 1901
Jean Marcel, le 7 août 1904
Marie Marguerite née le 26 mai 1907
François Rivière quant à lui, se maria avec Ernestine Clément le 4 juillet 1910 à Saint-Laurent-de-Jourdes (Vienne). Ils eurent deux enfants :
Fernande, née le 25 novembre 1910 à Saint-Laurent-de-Jourdes
Marcel, né le 5 mars 1913 à Salles-en-Toulon
Mais l’histoire de cette famille devait brutalement se terminer en 1914…

Un mystère familial Il y a un mystère concernant les circonstances de la disparition de François Rivière. Nul ne sut jamais dans sa famille, où, quand et comment il mourut. Sa veuve, décédée en 1971, devint domestique à Morthemer à quelques kilomètres au nord du Vigeant où elle vécut toute sa vie. Elle gardait simplement lesouvenir qu’à la fin de l’année 1914, le maire de Morthemer vint lui annoncer que François avait été tué au front ; mais elle n'aurait reçut aucun document officiel lui donnant des précisions. Sans tombe pour se recueillir, chaque année pour le 11 novembre elle allait simplement déposer des fleurs sur le monument aux mort de Morthemer qui pourtant ne portait pas le nom de François… Nous avons tenté de résoudre le mystère. Nos recherches se firent d’abord dans les registres d’état-civil de Morthemer où effectivement aucune mention du décès ne fut trouvée. Mais le fils de François, Marcel, étant né dans la commune voisine de Salles-en-Toulon, nous plongeons donc dans les registres de cette dernière commune et commençons alors à élucider le mystère en y découvrant en 1916, un acte précisant que le soldat de deuxième classe François Rivière du 268e Régiment d’Infanterie était "Mort pour la France"le vingt trois novembre 1914 des suites de ses blessures, à Fortun en Belgique.


Nous découvrons de même que le nom de François était inscrit sur le monument aux mort de Salle-en-Toulon, ce qu’ignorait sa veuve ; personne ne lui ayant jamais dit. Ne sachant pas lire (elle n'alla pas à l'école, devant consacrer ses jeunes années au gardiennage des chèvres familiales), elle ne remarqua jamais que le nom de son époux était gravé à seulement trois kilomètres de son domicile. Elle continua donc toute sa vie à honorer le souvenir de son époux au pied d’un monument dont elle savait quand même qu’il ne portait pas le nom de François.

François Rivière fit son service militaire au 68e Régiment d’Infanterie à l’issue duquel il reçut un certificat de bonne conduite qui nous donne une description physique : “Un mètre 642 millimètres, cheveux noirs, sourcils noirs, front découvert, nez épaté, menton rond, visage ovale” Son registre matricule nous apporte quelques précisions, et en particulier sur son décès. Il ne serait plus mort de ses blessures à "Fortun" mais "tué à l'ennemi" à Zonnebeck (Belgique).

Alors où est-il décédé ? Fortun ou Zonnebeck ? Notons que la fiche le concernant conservée aux archives du ministère des Armées (consultable sur le site Mémoire des Hommes) indique "Zonnebeck-Fortun"... Nous reparlerons de ce lieu de décès. Le 268e régiment d’infanterie Le journal de marche du régiment nous permet de suivre François durant les premiers mois de la guerre ( source : mémoire des hommes- journaux des marches des corps de troupe 268 RI - 26 N 733/1 - 4 août/24 décembre 1814). A la déclaration de la guerre, François fut donc incorporé au 268e régiment d’Infanterie qui quitta Le Blanc (Indre) le 10 août 1914 pour Nancy. Le voyage se fit en train, et le régiment arriva à Nancy le 11 et fut cantonné à Pompey au nord de la ville, près de Frouard. Le 12, ordre est donné de se porter sur Marbache plus au nord et de tenir la rive gauche de la Moselle. Le 13, le régiment se porte sur Bouxières-aux-Dames qui fut fut alors mis en état de défense. François Rivière et ses compagnons d’armes s’y installèrent jusqu’au 18, date à laquelle ils poussèrent leur avance jusqu’à Elmont puis, le lendemain, jusqu’à Dommartemont. Mais dans le même temps, l’armée allemande progresse jusqu’aux portes de Nancy, et le 21 le régiment de François Rivière doit se replier en urgence.

Le 21 donc, le repli débute à 01 h 30 du matin. Aux abords de Nancy le 268e est réuni au 290e et doit organiser la défense près de Buissoncourt et Horaucourt. François et ses compagnons creusent les tranchées entre "le ravin des 4 bouteilles" et "Pissotte". Travail titanesque qui se prolonge jusqu’au 1er septembre. Le 5 septembre le régiment se porte sur la région de La Ferré-Champenoise où les allemand tentent une percée.

Le 7 il est à Connantray ; où il est attaqué le lendemain à 3 heures du matin. Le régiment prend position aux lisières du bois côte 177 où il est victime d’une pluie d’obus l’obligeant à faire retraite sur la côte 155, sur un carrefour à 2 500 mètres au sud de Semoine. A 14h00 ordre est donné de lancer la contre-attaque. Le régiment parvient alors jusqu’ à un moulin au nord de Gourgançon. A 17h30, il s’empare d’Euvy et occupe une colline à 1 500 mètres de la ville en direction de La Ferré-Champenoise. Cette journée-là sera marquée par le décès de cinq compagnons d’armes de François Rivière, 74 blessés et 14 disparus.... Mais la journée du lendemain sera bien pire face à une attaque allemande obligeant les Français à reculer en laissant sur le terrain 7 morts, 141 blessés et 233 disparus… Entre les 10 et 12 septembre, le régiment multiplia les patrouilles et le 13, les Allemands abandonnant leurs positions, ordre est donné aux soldats français de se porter sur La Ferré-Champenoise pour y enterrer les morts… Le 18, le régiment est alors envoyé au sud de Reims, où il arrive le 20 prenant position dans les tranchées proches de Thuisy entre Prunay, Sept-Saulx et Les Petites Loges.

Le 25? le 268e RI occupe les bois au sud de la côte 98 où il essuie un bombardement. Attaqué le lendemain, François Rivière et ses compagnons reculent jusqu’aux Ludes, puis le 27, ils entrent à Montbré au sud de Reims et gagnent Ormes à l’ouest de la ville, fuyant toujours l’avancée allemande. Mais le 30 les Français lancent une contre-offensive ; reprenant Montbré puis, le 1er octobre, Trois-Puits et Villers. Le 2, ils percent jusqu’à Mourmelon-le-Petit avant de reprendre position à Thuisy le 3. Ils font alors face à l’armée allemande pendant quatre jours avant de se replier sur Mourmelon le 7. Le 9, ordre est donné au régiment d’assurer la défense du secteur compris entre la lisière est du Bois de Prosnes et la ferme Moscou, jusqu’au village de Baconnes. S’ensuivent des journées de bombardements sur les tranchées jusqu’au 12, date où le 268e est relevé et envoyé au repos sur Baconnes, puis retour au front le 15 et à nouveau relevé le 17.

Le 20, le 268e gagne Mourmelon pour, le lendemain, prendre le train pour rejoindre la frontière belge. Le 22 octobre, le régiment arrive ainsi à Bailleul au nord de Lille, et le 23 il passe la frontière et marche sur Ypres. Les Français prennent position à Saint-Jean au nord de la ville.


Le 24, ils creusent des tranchées à Fortun (Fortuinhoek) mais doivent les abandonner le jour même pour se porter sur Saint-Julien (St-Juliaan) où ils reçoivent l’ordre de s’emparer de Langemark avant la nuit. Le régiment est alors réorganisé et divisé en deux bataillons (le 5e et le 6e) nous ignorons lequel fut celui de François Rivière. Signalons que le 6e s’installa dans les tranchées le long du ruisseau Stroombeck et le 5e à 1 500m au Nord-Est de Saint-Julien. Le 25 octobre, les deux bataillons sont attaqués alors qu’ils tentaient de rejoindre l’arrière de la 33e brigade sur la route de Saint-Jean à Passendale. Le 6e est débordé et ne doit son salut qu’au secours de l’artillerie française et à l’intervention de 125e RI. Le 26 le 5e bataillon est en réserve à Fortun et le 6e marche sur Passendale où il est attaqué le 27 l’obligeant à se replier sur Fortun où il est mis au repos. Le 28 le 5e prend position à 600 mètres en avant du carrefour Passendale/Fortun et Langemark/Zonnebeck ; d’où, à 16 heures, il lance une attaque sur les positions allemandes et s’emparant de leurs tranchées. Le lendemain, les soldats du 5e progressent à nouveau de 300 mètres dans les lignes allemandes ; et le 30 octobre ils prennent position sur le ruisseau Stroombeck alors que le 6e bataillon s’installe à Zillebeck. Pour le 5e commence alors deux journées où, terrés aux fonds des tranchées sans pouvoir bouger, les soldats reçoivent une pluie incessante d'obus. Pendant ce temps le 6e attaque Hollebeck puis relève un bataillon anglais dans les tranchées au sud de Klein-Zillebeck. Le 1er novembre, toujours bloqués, les hommes du 5e bataillon commencent à relier les tranchées entre elles en creusant des tunnels, transformant les soldats en véritables taupes creusant leurs galeries sans même voir la lumière du jour. De son côté le 6e bataillon échoue à s’emparer du château de Hollebeck où des allemands se so